Les ambassadeurs dans une stratégie de marketing territorial et leur comportement face au public. Etude des cas avec OnlyLyon et Nord-Pas de Calais, La Créativallée.

Voici la conclusion de mon mémoire réalisé en Master 2 (communication des entreprises) à l’Université Libre de Bruxelles sous la direction de Monsieur Olivier Arifon.

Aujourd’hui, les territoires se retrouvent de plus en plus en concurrence dans un marché  mondial caractérisé par d’importants échanges de capitaux et de personnes. Les territoires doivent se rendre attractifs afin d’attirer entreprises, investisseurs, touristes, étudiants, résidents, chercheurs, événements sportifs ou culturels, etc. et utilisent pour ce faire des outils issus du domaine du marketing.

Avec l’arrivée des pays émergents, de plus en plus de territoires ont une carte à jouer au sein de ces échanges et doivent dès lors se différencier entre eux par la création d’une identité[1]. C’est à travers ce positionnement stratégique, qui est spécifique au territoire et qui reflète ses atouts, que celui-ci doit communiquer envers les cibles qui l’intéressent au sein d’un ou de plusieurs marchés.

C’est l’organisme pilote de la démarche de marketing territorial – qui agit souvent collectivement avec d’autres organismes en charge du développement socioéconomique du territoire dans une démarche dite de « coproduction » – qui organise la communication à travers des campagnes de communication de marketing, des actions de relation publique, des participation à des salons, etc.

Depuis quelques années, un nouvel outil de communication a fait son apparition dans le paysage de la communication territoriale : le réseau d’ambassadeurs. En clair, certains territoires, dans leur démarche de marketing territorial, font appel à des individus volontaires pour agir bénévolement afin de promouvoir le territoire car ils en sont fiers.

A partir de là, deux problématiques ont été posées. La première est la question de la pertinence d’un tel réseau au sein d’une démarche de marketing territorial. La seconde est la question des dérives éventuelles qui pourraient apparaître au sein des communications des ambassadeurs car ces derniers ne sont pas forcément des professionnels de la communication.

Pour répondre à ces deux questions, une méthodologie a été appliquée. Elle consiste en la réalisation d’une revue de la littérature sur le sujet du marketing territorial et des politiques d’ambassadeurs ; une veille effectuée sur différentes marques territoriales européennes ; deux enquêtes sur échantillon sur deux réseaux d’ambassadeurs faisant partie de l’étude de cas du mémoire – OnyLyon et Nord-Pas de Calais, La Créativallée -; et des entretiens de recherche avec les community managers de ces deux territoires et avec des experts du marketing territorial européen.

L’ambassadeur est un individu jouant le rôle de prescripteur en faisant la promotion du territoire via, la plupart du temps, le bouche à oreille. De plus, il peut aussi jouer le rôle de point de contact entre le territoire et des projets de développement pour ce dernier. L’ambassadeur rejoint un réseau composé d’individus qui, tout comme lui, veulent promouvoir le territoire. Le réseau peut être composé de personnes habitant dans le et/ou hors du territoire. Il peut en outre être ouvert à tous ou exclusif à une certaine communauté d’individus. Enfin, le réseau peut être limité ou illimité en termes de participants.

Une politique d’ambassadeurs au sein d’une démarche de marketing territorial est pertinente pour plusieurs raisons : l’effet viral engendré par leur communication, la démultiplication de cet effet grâce aux TIC et notamment au web 2.0, la nouvelle source d’informations disponible pour les cibles, sa parfaite intégration dans la démarche de « coproduction », les solutions amenées aux problèmes d’abstraction et aux manques d’éléments de l’identité territoriale et enfin un moyen de justification de la démarche de marketing territorial face aux citoyens du territoire n’y étant pas favorables.

Néanmoins, quelques limites ont été trouvées. Il s’agit de la mauvaise publicité éventuelle faite à un niveau local émanant de certains, jugeant le coût de la démarche des ambassadeurs trop élevé ou étant jaloux de ne pas avoir pu rejoindre le réseau ; de la difficulté à calculer le Retour sur Investissement ; du coût de la démarche qui nécessite des coordinateurs, un community manager et des outils off line et online permettant de gérer le réseau ; et de l’inactivité des ambassadeurs et des dérives au sein de leurs communications.

Le réseau est par défaut peu qualitatif. En effet, les ambassadeurs ne sont pas forcément des professionnels de la communication, viennent d’horizons différents et ont des attentes différentes par rapport à leur nouveau rôle. Comment dès lors agir pour que la communication de l’ensemble des ambassadeurs soit harmonieuse, cohérente, respectueuse de l’identité du territoire et qu’elle contribue ainsi à la quête d’attractivité de ce dernier ?

Pour les guider dans leur rôle de communicant, les démarches de marketing territorial créent des offres de services destinées aux ambassadeurs via des coordinateurs. Ces derniers proposent généralement un kit de promotion, un extranet dédié, un site internet, une page Facebook et un compte Twitter, une newsletter, des rencontres de type physique, un community manager à l’écoute et prêt à interagir et d’autres outils plus spécifiques à certaines démarches tels que le widget, application smartphone, un comité d’ambassadeurs ou une segmentation du réseau sur différents critères.

Les ambassadeurs utilisent-ils ces offres de services lorsqu’ils souhaitent communiquer ? Pas assez si l’on se réfère à l’étude de cas. En effet, les ambassadeurs d’OnlyLyon et de Nord-Pas de Calais, La Créativallée préfèrent utiliser les informations à propos du territoire issues des médias. En outre, les deux réseaux d’ambassadeurs communiquent essentiellement via le bouche à oreille et les réseaux sociaux vers des contacts correspondant à leur connaissance et étant principalement intéressés par le tourisme pour OnlyLyon et l’économie pour Nord-Pas de Calais, La Créativallée..

Au sein de ces comportements, des dérives liées au non-respect de l’identité dues à la non-utilisation ou la mauvaise utilisation des offres de services proposées par les coordinateurs aux ambassadeurs ont été constatées. Elles sont dues au manque d’attractivité ou à l’effort trop important demandé de certaines offres de services pour le premier type de dérives et au manque de clarté et de présence de certaines informations issues des offres de services pour les seconds.

Néanmoins, ces dérives semblent pour le moment peu dommageables pour l’identité du territoire et sa quête d’attractivité. D’ailleurs, le combat des dérives dans la communication des ambassadeurs n’est pour l’instant pas l’enjeu majeur des démarches d’ambassadeurs. D’après l’étude de cas, l’enjeu actuel serait situé en amont, dans le fait de faire agir l’ambassadeur. Communiquer sans fautes, sans dérives, serait le comportement ultime de l’ambassadeur dans son rôle de communicant. Il constituerait un réel enjeu une fois que les ambassadeurs agiront énormément pour la promotion du territoire.

Dès lors trouver des moyens pour permettre à l’ambassadeur de communiquer sans dérives est pertinent pour, d’une part obtenir de la part des ambassadeurs une communication la plus qualitative possible, harmonieuse et cohérente et d’autre part pallier les futurs dérives potentiellement dommageables, notamment une fois que les ambassadeurs communiqueront énormément. Penser aux solutions aujourd’hui, c’est avoir un temps d’avance et être prêt une fois le moment de la phase d’action accomplie.

Les moyens trouvés et évoqués dans le mémoire permettent de pousser les ambassadeurs ne s’inspirant pas des informations fournies par les coordinateurs à s’en inspirer, d’autres à permettre aux ambassadeurs de ne pas se tromper lorsqu’ils s’inspirent de ces informations. Il s’agit de créer un réseau « semi-ouvert » plus sélectif, segmenter les ambassadeurs selon leur domaine de compétence, simplifier le message leur étant adressé de la part des coordinateurs, créer des outils plus attractifs notamment via la biais du web 2.0, garder les démarches de « co-créations » avec des ambassadeurs volontaires, créer chez eux un sentiment de privilège, garder les réunions de type physique, leur fournir des missions claires et une base théorique à propos du territoire et de ses valeurs, ne pas provoquer chez eux un niveau de saturation par rapport à la réception des messages des coordinateurs, disposer de moyens financiers et humains non-négligeables, nommer un community manager compétent, proposer une pluralité d’outils pour communiquer aux ambassadeurs, créer une charte, exécuter des campagnes RP agressives et enfin surveiller la marque et les commentaires des ambassadeurs sur la toile et rectifier le tir si possible lorsque des dérives ont été trouvées.

[1] Govers (Robert), Go (Frank), Place Branding, Glocal, Virtual and PhysicalIdentities, constructed, Imagined and Experienced, London, Palgrave Macmillan, 2009, p. 130.

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